Investissements directs étrangers: Entretien du président Moise avec l’émir du Qatar
Le président haïtien, Jovenel Moise, a annoncé son entretien avec Son Altesse Cheikh Tamim Bin Hamad Al-Thani Emir de l’Etat du Qatar. Au cours de leur entretien, de nombreux sujets ont été abordés, notamment le Fonds de garantie pour financer les PME, les possibilités d’investissement dans les énergies renouvelables et le renforcement de la coopération entre les deux pays. Le gouvernement du Qatar possède l’un des plus grands fonds souverains au monde, à savoir le fonds souverain du Qatar (Qatar Investment Authority, QIA) ayant pour mission d’investir, de gérer et de faire croître les réserves du Qatar afin de soutenir le développement de l’économie du Qatar. Ayant l’un des taux les plus bas d’investissement direct étranger, Haïti profitera-t-elle pleinement de ses relations diplomatiques avec le Qatar, détenteur de l’un des plus grands fonds d’investissement étranger au monde?
L’investissement direct étranger (IDE) est une source importante de financement extérieur pour les pays en développement. Non seulement l’IED peut accroître les ressources investissables et la formation de capital, mais, peut-être plus important encore, c’est aussi un moyen de transférer la technologie de production, les compétences, la capacité d’innovation et les pratiques organisationnelles, ainsi que d’accéder aux réseaux de marketing internationaux.
L’IED a augmenté à un rythme phénoménal depuis le début des années 80, et le marché mondial est devenu plus compétitif et la répartition des entrées mondiales d’IED est largement inégale. Malgré des politiques favorables et des incitations fiscales pour attirer les IDE, Les taux d’IDE en Haïti sont parmi les plus bas au monde reflétant l’évaluation par les investisseurs de la croissance lente de l’économie du pays et de l’environnement politique instable, de la corruption et de la bureaucratie.
Selon le Rapport sur l’investissement dans le monde 2020 de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), les flux d’IDE en Haïti ont diminué à 75 millions USD en 2019, contre 105 millions USD en 2018. Le pays se classe 179e sur 190 dans le rapport Doing Business 2020 publié par la Banque mondiale.
Les secteurs des transports, des télécommunications et du pétrole attirent le plus d’IDE. Plus récemment, la construction, le textile et la fabrication de composants automobiles ont également attiré des investissements étrangers. Le développement du secteur de l’énergie représente un champ d’opportunité pour des investissements majeurs en Haïti – un sujet débattu par les deux dirigeants, selon l’annonce du président haïtien.
Bien que la population du Qatar soit relativement petite, son fonds souverain est l’un des plus importants au monde et son taux de chômage est parmi les plus faibles du monde. Cela signifie que le pays dispose d’importantes ressources disponibles pour investir ailleurs.
Le mandat de QIA est de développer, d’investir et de gérer les fonds de réserve de l’État et les autres biens qui lui sont attribués par le gouvernement via le Conseil suprême des affaires économiques et des investissements. La loi fondatrice de QIA donne au fonds la capacité, les pouvoirs et les compétences nécessaires pour agir dans l’accomplissement de son mandat statutaire et atteindre ses objectifs.
La Qatar Investment Authority se classe au 11e rang mondial, selon le Sovereign Wealth Fund Institute. Il a accumulé des actifs de plus de 2 billions de dollars comme coussin en cas d’épuisement du pétrole ou de baisse des revenus. Les fonds souverains du Moyen-Orient ont dépensé des milliards de dollars en actifs trophées, tels que l’immobilier à Londres et des participations dans des banques mondiales. La QIA a également ciblé davantage d’investissements aux États-Unis et en Asie et dans des secteurs tels que la technologie et la santé afin de diversifier son portefeuille.
En mars 2019, l’ambassadeur d’Haïti, Bocchit Edmond a annoncé la décision du gouvernement d’Haïti d’ouvrir une ambassade à Doha estimant qu’Haïti ne pourra pas progresser économiquement sans investissement étranger sous la forme d’un partenariat économique avec les retombées de la création d’emplois, création de richesse et renforcement des PME locales. François Guillaume II, chef de mission et chargé d’affaires de l’ambassade d’Haïti à Doha a également expliqué récemment que les relations bilatérales entre le Qatar et Haïti peuvent apporter des initiatives mutuellement avantageuses dans plusieurs domaines, notamment l’agro-industrie, le tourisme, les infrastructures, l’industrie et l’immobilier.
Tout au long de son histoire, les relations diplomatiques d’Haïti n’ont pas été en mesure d’aider le pays à prospérer économiquement. Par exemple, bien que les États-Unis aient été réticents à reconnaître Haïti après son indépendance, les États-Unis sont aujourd’hui le principal partenaire commercial d’Haïti tant pour les exportations que pour les importations. Haïti bénéficie d’un traitement préférable au marché américain. Mais le pays ne parvient pas à capitaliser sur l’accès au marché le plus important du monde.
Le gouvernement haïtien a renforcé ses liens avec le gouvernement du Qatar. L’administration Moise-Jouthe réussira-t-elle à tirer pleinement parti de ces relations diplomatiques en aidant Haïti à puiser dans le fonds QIA et en apportant des investissements étrangers directs pour faire croître l’économie haïtienne?