Coup d’État au Mali: une situation trop familière
Le président malien Ibrahim Boubacar Keita a été démis de ses fonctions lors d’un coup d’État mardi. Il avait remporté un deuxième mandat aux élections de 2018, mais faisait face à d’énormes manifestations de rue depuis juin pour corruption, mauvaise gestion de l’économie et élections législatives contestées. Cette semaine, des soldats ont arrêté le président, M. Keita, qui, dans une vidéo, a démissionné derrière un masque facial, demandant : « Ai-je vraiment le choix ?»
Scène familière
Les Maliens ne sont pas étrangers aux coups d’État militaires. Ils en ont été témoins en 1968, 1991 et 2012. En 2012, la scène de la capitale malienne, Bamako, montre une vue trop malheureuse et familière de nombreuses capitales africaines. C’était la vue du chaos, avec des soldats tirant en l’air et pillant les bâtiments gouvernementaux à la suite d’un coup d’État.
En 2012, les islamistes ont profité du vide pour lancer des attaques à travers le nord, ce qui a poussé la France à envoyer des troupes.
La colère des soldats face à la gestion du conflit n’a cessé de s’intensifier parce qu’ils voient le gouvernement déconcerté et dirigé par une élite du Sud qui n’a pas fait grand-chose pour arrêter la violence – encore moins pour s’attaquer à ses causes.
Les putschistes disent être en contact avec l’opposition politique et d’autres groupes pour tenter de mettre en place une transition. Ils déclarent également que les élections se tiendront dans ce qu’ils décrivent comme un délai raisonnable et ont également promis de respecter les accords internationaux sur la lutte contre les djihadistes.
Réactions internationales
Le coup d’État a été fermement condamné par la communauté internationale. L’ONU a appelé à la libération des responsables et les dirigeants ouest-africains ont refusé «catégoriquement» de reconnaître toute légitimité au coup d’État et a exigé la libération immédiate d’IBK.
La Communauté Economique et de Développement des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) impose un embargo économique partiel après le coup d’État. Lors d’un sommet virtuel extraordinaire, les chefs d’État du bloc régional, composé de 15 pays (dont le Mali), ont soutenu cette mesure.
La CEDEAO a appelé à “l’interruption des relations économiques avec le Mali. Des exceptions ont été accordées pour les aliments de base, les carburants et les médicaments. Ces exceptions avaient été faites au profit du peuple », a déclaré la présidence nigériane.
Après la destitution d’Ibrahim Boubacar Keïta, les responsables du coup d’État au Mali affirment qu’un président de transition sera nommé. De plus, il sera issu de la population civile ou de l’armée.
La junte dit également vouloir des élections, mais les États voisins ont condamné le coup d’État. Ils ne veulent pas que les Maliens donnent des idées à leur propre peuple parce que, plus les coups d’État restent impunis, plus ils sont susceptibles de l’être à l’avenir.
Les voisins partagent aussi les préoccupations occidentales concernant la violence jihadiste au Sahel. Comme le suggèrent les événements de 2012, les islamistes sont opportunistes et profiteront de la paralysie.
Le Mali est parmi les plus pauvres du monde et a connu plusieurs prises de contrôle militaires. Il lutte actuellement pour contenir une vague d’attaques djihadistes et de violences ethniques. La CEDEAO a annoncé qu’elle enverrait des envoyés pour assurer le retour à l’ordre constitutionnel.